Morvan
et Li-An adaptent Jack Vance
En adaptant Le Cycle de Tschaï, Morvan et Lî An s'attaquent à
un monument de la S. F.
Tschaï est en effet l'une des oeuvres les plus connues, les plus rééditées,
de la littérature de science-fiction des années soixante.
(500 000 exemplaires vendus )
Comment l'idée de traduire en bande dessinée cette épopée
haute en couleur et en aventures est-elle née ? Les principaux intéressés
répondent.
Jean David Morvan : "C'est lors d'un séjour à La Réunion
que Li-An m'a fait découvrir Jack Vance et Tschaï .Je ne lisais
plus beaucoup de S.F. de peur de tomber sur des thèmes que j'avais envie
d'utiliser et, du coup, de ne plus oser les aborder. Là, la lecture s'est
faite d'une traite et, moi qui aimais plutôt le Cyberpunk à celle
époque, j'ai été emporté par l'aventure. L'idée
d'une adaptation n'a pas été immédiate, même si un
soir nous l'avons évoqué sur le ton de la plaisanterie tout en
imaginant la difficulté d'obtenir les droits."
Li-An : "En effet, l'idée est arrivée d'une manière
étrange car, c'est après plusieurs projets avortés avec
Jean David que celui-ci s'est souvenu de ma passion pour Vance et Tschaï.
Il a fait part de l'idée à Guy Delcourt, qui a négocié
avec succès les droits auprès de l'agent de Vance. Jack Vance
est l'un de mes auteurs préféré, tous genres confondus,
et j'ai pratiquement dévoré touts ses livres. J'ai tendance à
m'identifier à ses héros sombres, solitaires et toujours en vadrouille,
j'apprécie son humour, sa vision de la vie et la légèrelé
de ses intrigues."
JDM : "L'Intrigue est en effet assez proche de celle d'un "pulp",
ce qui permet aujourd'hui de percevoir un second degré qui n'était
d'ailleurs peut-être pas voulu. Par exemple, Vance décrit son héros,
Adam Reith, comme le parfait conquérant américain. sûr de
son bon droit. J'accentue cet aspect, j'en rajoute un peu dans le ton jusqu'à
rendre le personnage parfois suffisant. Le fait de ne pas être un fan
absolu de Vance m'a permis justement d'ajouter des envies personnelles liées
à ce second degré. C'est très agréable de pouvoir
apporter quelques petites touches personnelles au travail d'un autre, de prendre
quelque; libertés, d'autant plus que nous ne subissons pas de censure."
Li-An : "J'ai lu le cycle une dizaine de fois et je pensais que
le dessin allait couler de source. Mais très vite, je me suis heurté
à des problèmes auxquels je ne m'attendais pas, notamment les
descriptifs de Vance qui ont une résonance avec l'imaginaire visuel des
années 60-70 et qui auraient semblé vieillots en les dessinant
au premier degré. Certaines descriptions sont contradictoires ou partielles,
d'autres trop minutieuses pour que je puisse les respecter et les redessiner
plusieurs fois. Nous avons supprimé certaines scènes, comme celle
où Vance raconte avec détail un repas pris dans une auberge, ou
bien encore des pages de descriplion de monstres en tous genres. Avec Jean David,
nous avons décidé de conserver l'esprit plutôt que la forme,
de garder en fait une liberté visuelle . Pour les couleurss, je suis
en relation permanente avec Scarlett qui connaît merveilleusement bien
Tschaï et qui apporte donc sa vision. C'est un atout très important."
JDM : "Pour ma part, la principale difficulté vient de la
pagination. Nous avons découpé chacun des romans en deux parties,
ce qui nous autorise 92 planches BD par roman. Je suis obligé d'élaguer
tout en conservant ce qui est primordial chez Vance : l'univers. Même
si l'intrigue est un prétexte, je ne peux pas trop la resserrer. je dois
donc faire confiance Li Li-An pour développer le monde de Tschaï
dans ses arrières-plans.
Li-An : "Dans le tome 2 qui est déjà bien avancé
(i1 paraîtra en janvier 2001), nous conservons une approche identique,
et j'ai toujours le même stress à l'idée de ne pas pouvoir
tout raconter. J'ai hâte d'aborder le Wankh et surtout Le Dirdir dans
lesquels les thèmes vanciens sont les plus présents. Ma perception
de l'oeuvre de Vance n'a pas changé, c'est plutôt l'approche décalée
de jean David qui m'apporte un nouvel éclairage. Encore une fois, sa
vision d'Adam Reith en "Rambo" m'amuse car j'ai moi une vision plus
romantique. Reith est un héros de mon adolescence. Mais nous avons trouvé
un bon compromis..."
JDM :"Je reste attaché à donner une logique et un
certain réalisme aux actions d'Adam Reith . Par exemple dés le
début du second tome, je le fais dormir car il doit être épuisé
d'avoir tant couru dans le premier album. Cette idée a beaucoup fait
rire Li-An... qui a fini par l'accepter."
© Delcourt Planéte n°12 ,Avril-Juin 2000
Publication avec leur autorisation
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